Gare standard VS Gare unique ?

Gare standard VS gare unique / quel schéma de co-construction pour la gare TER de demain ?

Le référentiel des gares, produit par la Région Bretagne en 2005, présente différents modes de déclinaison d’une gare standard, à travers des préconisation sur le paysage, la communication visuelle, la signalétique, et le mobilier. Ce référentiel concerne exclusivement le bâti des petites gares, et ne prend pas en considération les variations d’usage qu’il peut y avoir entre une gare périurbaine, une gare rurale, une gare isolée ou connectée… D’autre part, malgré diverses pistes pour intégrer la gare au paysage, et créer un environnement harmonieux, il n’en ressort pas moins l’image d’une gare « standard » partagée entre le modèle d’avant, c’est-à-dire un bâtiment public à guichet, et le nouveau modèle, c’est à dire la halte voyageur avec guichet numérique. Si faire table rase des bâtiments de gare, et remplacer les agents par des bornes semble la tendance naturelle à l’heure actuelle, ça n’en reste pas moins un chantier extrêmement lourd, et symbolique pour les collectivités locales, qui y voient le retrait progressif du service public de proximité.

Capture d’écran 2016-02-09 à 11.26.29

Plusieurs scénarios se dessinent donc, à l’écoute de nos partenaires :

  • la SNCF (via TER Bretagne) transforme progressivement son offre de service vers une unification des gares en version « halte numérique ». Les bâtiments de gare sont revendus à des particuliers ou des commerces franchisés, et les abords de gare sont réaménagés en plateformes multimodales par les collectivités et la Région. Les agents de gare deviennent « agents volants » ou référents multi-gares sur des portions du réseau, principalement en charge de contrôler et de vendre des services SNCF à bord des trains.
  • La Région, en lien avec TER Bretagne, reprend la main sur les gares régionales, et réinvente les fonctions du guichet. Certaines gares, trop peu fréquentées, ferment (elles se transforment en haltes), et d’autres, plus stratégiques, restent ouvertes, et dispensent un service d’information et de vente sur toutes les offres de transport. Cela va de pair avec la prédominance de la Région dans les politiques de transport public. Cette hypothèse valorise évidemment les gares fréquentées, où la multi-modalité est un enjeu fort autour des gares. L’avenir des gares rurales, ainsi que le dynamisme du réseau TER dans des zones peu fréquentées, restent incertains.
  • La Région, les collectivités locales et TER Bretagne co-décident et co-financent une activité sur-mesure pour la gare. Les services SNCF sont assurés par les outils numériques (bornes, applis) avec un accompagnement minimum de la part de l’agent en gare. Cet agent n’est plus seulement guichetier mais médiateur multi-services chargé de promouvoir et diffuser l’offre de services locale, à la manière d’un PIMMS ou d’une Maison de Services au Public. Ses mandats sont : les transports (de tous types, publics et privés), les services de proximité (conciergerie…) et plus largement l’attractivité du territoire (promotion des ressources locales, des activités culturelles, etc.). Des partenariats plus globaux peuvent être inventés (comme la “gare – guichet de Poste”) – scénarios qui sous-tendent un devenir et une identité radicalement différents du réseau TER.

Dans le premier cas, les petites gares perdent toute identité territoriale. Elles deviennent des points standards d’accès aux services SNCF. Leur communication est homogénéisée au niveau régional (logo, langue, signalétique) et leurs bâtiments originaux ne sont plus qu’un souvenir d’un autre âge du transport public. Dans les deux autres scénarios au contraire, les gares deviennent des lieux de ré-appropriation de l’identité du territoire, et de promotion des services locaux. Les missions des agents couvrent un bouquet de services beaucoup plus large, et doivent être définies en fonction des ressources et des besoins spécifiques au territoire : démographie, dynamisme culturel / économique, usages et pratiques de la population … Bref c’est une ingénierie nouvelle qui doit s’inventer pour positionner chaque gare TER, sans que cela ne devienne une usine à gaz. Comment donc passer de la gare « tout standard » à la gare « TER / unique » ?

En deuxième semaine de résidence, nous avons pu tester un modèle d’atelier pour « co-construire » l’avenir d’une gare TER. Cet atelier avait pour premier objectif de rassembler les acteurs clé d’un projet de gare autour d’un diagnostic commun, identifié selon 5 grappes de critères : le rayonnement de la gare sur le territoire, l’accessibilité de la gare, le confort de la gare pour les usagers, la variété du bouquet de services SNCF / TER, et enfin la présence en gare de services annexes, locaux ou non. Au croisement de ces différents critères, différents portraits de gare peuvent ressortir, ce qui permet de sortir de la distinction binaire de « gare avec guichet VS halte voyageur », comme le montrent ces exemples.

Diagramme par typo

A partir de ces critères, la démarche de l’atelier visait à mettre en regard les enjeux et les ressources de chaque acteur (exemple : « promouvoir les transports doux aux abords de gare » de la part d’un représentant de la communauté de communes). Puis à prioriser ces enjeux pour les traiter en groupes de travail. Nous avons convenu de travailler sur une nouvelle version de cet atelier en vue de la semaine 3. De fait, si un outil pour animer une discussion multi-acteurs semble faire sens (en cohérence avec notre troisième scénario), il ne peut pas pour autant s’arrêter à la formulation d’enjeux généraux, qui risquent rapidement d’être toujours les mêmes. Il s’agit plus précisément de définir les briques de fonctionnalité qui pourraient caractériser la gare TER de demain.

DSC03635Nous imaginons donc prolonger la réflexion de plusieurs manières : tout d’abord superposer au cercle « diagnostic » (ou définition actuelle de la gare) un cercle « prospective », proposant des fonctions à plus ou moins long terme. Ce nouveau cercle permettrait dans un premier temps de produire des visions extrêmes de la gare de demain : par exemple « la gare rurale / hub numérique », ou « la gare / maison du projet urbain ». Dans un deuxième temps, l’idée serait de proposer un nouveau déroulé d’atelier, permettant de croiser enjeux du territoire et vision prospective de la gare. Pour finir, nous réfléchissons à introduire une dimension expérimentale dans cette feuille de route vers la gare de demain. En effet, le principal frein à la réinvention des gares, outre la complexité du dialogue multi-acteurs, est le montage financier. En effet, aucun des acteurs en place ne souhaite s’engager dans un chantier (qu’il s’agisse de rénover un bâtiment ou de mettre en place un nouveau service …) sans avoir d’assurance sur la rentabilité à long terme du projet. Une voie possible pourrait donc être de proposer des fonctions « test » sous forme de pack expérimentaux, implémentables en gare sur une durée ponctuelle, avant de devenir des projets pérennes. C’est d’ailleurs une logique déjà en place, par exemple avec le prêt de vélos et de trottinettes électriques par TER Bretagne (initiative du service marketing). Cette logique peut-elle être développée, et devenir un vrai support de discussion entre SNCF / TER, la Région, et les collectivités locales ? La suite, en semaine 3 !

P1110458

cercle « prospective » / briques de fonctionnalités potentielles en gare